@Noémie Lévy
Rédactrice Psycho-Santé
Jessica, la rage de donner la vie
En 2005, Jessica rencontre son conjoint. En 2010, ils décident d’avoir un bébé.
Néanmoins, après l’arrêt de la pilule, plus de cycles et toujours pas de bébé. Ils décident de consulter une gynécologue. Le diagnostic tombe : l’infertilité est liée à un trouble hormonal qui s’appelle le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) aussi appelé ovaires paresseux. Il n’y a pas d’ovulation ou rarement. Le syndrome des ovaires polykystiques touche 1 femme sur 10 en France. Et d’après l’OMS, au bout d’un an d’essais infructueux, on est même considéré comme infertile.
Alors, pour Jessica et d’autres couples qui ne peuvent pas avoir d’enfant par voie naturelle, il existe un remède : la procréation médicalement assistée (PMA), en France depuis 1994.
Premiers rendez-vous
Jessica et Sylvain commencent une batterie d’examens : bilan hormonal, échographie, spermogramme, hystérographie… La gynécologue propose d’essayer l’insémination artificielle (IAC). Cette technique consiste à déposer le sperme du conjoint ou d’un donneur, directement dans l’utérus de la femme, après un recueil de sperme. Mais Jessica s’expose à un risque de surproduction d’ovocytes et donc de grossesses multiples. C’est la fin du traitement…
Comme une impression d’être juste une femme, avec un autre “pas encore”
Une autre technique est la fécondation in vitro (FIV) c’est-à-dire une rencontre des spermatozoïdes et de l’ovule en laboratoire en dehors du corps de la femme. Le traitement est plus lourd et contraignant, il nécessite des injections tous les jours et des échographies tous les 2 jours. Le taux de fécondation n’est pas connu à l’avance et malgré un nombre élevé d’ovocytes, aucun n’a été fécondé. La biologiste propose à Jessica d’opter pour une FIV ICSI : on injecte directement un spermatozoïde unique dans chaque ovocyte. Après l’injection dans l’utérus de 2 embryons, Jessica et son mari Sylvain attendent 15 jours. L’attente est insoutenable et le résultat (encore) négatif. Comme une impression d’être juste une femme avec un autre “pas encore”.
“Je pleure. Je ne veux plus entendre que c’est dans ma tête. J’en veux à la Terre entière. Ma sœur aînée ne rencontre aucune difficulté pour tomber enceinte. Pourquoi pas moi ? Pourquoi mon corps se met en veille et de quoi veut-il se protéger ?” Jessica est bouleversée, ses émotions incontrôlables et pourtant c’est ce qui lui donne encore plus de force pour continuer : elle programme un transfert d’embryon congelé (TEC) en juin 2013 mais la tentative échoue.
4 ans pour réaliser leur rêve.
Quelques mois après leur mariage (septembre 2013), Jessica est très fatiguée. Elle programme de nouveau une FIV ICSI le 11 décembre.
“La nuit du 15 décembre, j’attends impatiemment l’appel du médecin et le 16 au matin, j’apprends enfin que je suis prête à accueillir mes blastocystes (embryon de 5/6 jours) ! C’est une première bonne nouvelle. Le résultat est prévu le 25 décembre”
Les parents sont capables de déplacer des montagnes mais ceux qui souhaitent le devenir sont capables de bien plus encore
Mais 15 jours après, elle file aux urgences à cause d’une hyperstimulation ovarienne : elle a des douleurs abdominales et son ventre est anormalement gonflé comme si elle était enceinte de 6 mois. Jessica est alitée et hospitalisée pendant 15 jours. Le drainage de l’ascite abdominale pourra la soulager. Le 25 décembre, elle fait une prise de sang et le résultat est positif ! Wow ! Après qu’ils se soient battus pendant 4 ans, ils allaient enfin devenir parents ! “Le parcours PMA laisse des blessures mais change une vie ; les parents sont capables de déplacer des montagnes mais ceux qui souhaitent le devenir sont capables de bien plus encore, et c’est vrai !”. Louane est née le 28 août 2014.
En décembre 2014, Sylvain et Jessica décident de recommencer les traitements avec l’accord de la gynécologue afin de prendre de l’avance et anticiper tout délai de grossesse. Mais le corps de Jessica ne réagit plus du tout aux traitements et elle est mise sous ménopause artificielle pendant 3 mois pour “reposer” son corps.
Un petit garçon et… un bébé surprise !
En mai 2015, Sylvain et Jessica recommencent une FIV pour un deuxième enfant. L’hyperstimulation ovarienne reprend aussi 15 après… Jessica tombe enceinte tout de suite, de jumeaux mais en perd un. Jessica est alors arrêtée toute sa grossesse pour ne pas perdre le deuxième ; Elle souhaite accoucher sans péridurale – comme pour Louane – pour retrouver un peu de naturel dans tout ce contexte si médicalisé dont les gestes ne sont finalement que mécaniques. Son deuxième enfant, le premier petit garçon naît le 25 janvier 2016.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là ! Après toutes ses tentatives de grossesse dont 2 réussites, la gynécologue lui annonce qu’elle ne pourra plus tomber enceinte. Sauf que… En septembre 2018, elle tombe enceinte de manière naturelle, sans aucun signe (elle le découvre à 9 semaines) ! Et en avril 2019, c’est le temps des fleurs, Jessica donne naissance à une petite fille, Léna, son 3ème enfant ! “Ce n’était pas prévu mais Dame Nature avait décidé de nous faire ce cadeau, c’était une évidence pour nous de garder ce bébé”.
C’est effectivement un combat, une sorte de guerre psychologique
Jessica a été suivie à l’hôpital Femme Mère Enfant (HFME), entièrement dédié au couple, à la mère et à l’enfant, et d’après elle : “le personnel médical était très à l’écoute en prenant mon corps en considération. Je voulais tout savoir, suivre de très près chaque étape et les médecins ont toujours eu les bons mots et les réponses à mes questions parce que c’est notre vie, notre futur“.
Pour clôturer cet entretien, j’aimerais citer Maris Dubois, auteur et dessinatrice de la BD Un bébé si je peux, une co-édition Massot-Revue XXI. Un voyage intime au cœur de l’infertilité, et de ce long parcours pour enfin donner naissance.
“C’est effectivement un combat, une sorte de guerre psychologique – jusqu’au terme abscons au début de PMA puis, on parvient à trouver ses repères. Les couples ont de plus en plus de mal à faire des enfants, un couple sur cinq en France consulte pour infertilité. Il y a des raisons scientifiques qui sont notamment liés aux perturbateurs endocriniens, et on voit des pathologies qui explosent en ce moment.
C’est pour ça qu’il y a de nombreux blogs, parce que c’est très dur d’avoir un tableau d’ensemble. La PMA est une science relativement récente qui n’arrête pas de changer : avoir les bonnes infos, les mettre en relation n’est pas évident.”
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